vendredi 24 avril 2009

Exposition "Pierres rejetées" Jimmie Durham


Le musée d'Art moderne de la Ville de Paris présente actuellement « Pierres rejetées... », une rétrospective de l'œuvre de l'artiste américain d'origine Cherokee, Jimmie Durham. Installé depuis 1994 en Europe, cet acteur majeur de l'art contemporain, pourtant peu connu, a longtemps défendu la cause indienne tout en dénonçant l'impérialisme et la ségrégation. Son œuvre est marquée par sa quête identitaire et son esprit anticonformiste. En détournant sa propre identité dans la série de photographies Self-Portrait, l'artiste réinvente son histoire.
Il transparaît dans son travail un refus total d'appartenir à un quelconque système, qu'il soit gouvernemental ou esthétique. C'est avec humour et violence qu'il critique la vanité de l'homme et sa soumission à une société hiérarchisée. La diversité que l'on retrouve dans cette exposition, renforce le caractère libre de cet artiste nomade qui juxtapose des matériaux bruts à des produits manufacturés. Il crée ainsi un parallèle entre la nature et son exploitation par l'omniprésence de la technologie dans notre société de consommation. Le style unique de l'œuvre de Jimmie Durham s'explique par son combat contre les normes sociétales et géographiques. A travers ses sculptures, ses vidéos, ses dessins et ses photographies, il se réapproprie des symboles forts tels que l'Arc de Triomphe qu'il reconstruit à échelle humaine en bois et en métal. Cette pratique a pour but de détourner la volonté de la culture occidentale qui est de dominer et d'exprimer sa puissance par ses monuments.
La nature occupe une place importante dans l'œuvre de Jimmie Durham. Elle est à la fois témoin et victime d'une société autodestructrice. On retrouve ainsi des tranches de tronc d'arbres marquées par des balles de fusils pendant la 2nde Guerre Mondiale ou encore une plaque de marbre saignante blessée en plein cœur. Cette nature qui porte les stigmates d'un monde irrespectueux envers elle nous apparaît avec une douceur et une brutalité décalée. L'artiste utilise régulièrement dans son œuvre la pierre, symbole de l'architecture et métaphore de la contestation, comme outil de destruction. La nature semble ainsi se venger en cabossant un frigo à de multiples reprises dans St Frigo ou en écrasant un avion de tourisme dans Encore tranquillité avant de se calmer pour laisser place au concert d'une forêt dans la vidéo Grunewald.
L'exposition « Pierres rejetées... » qui nous apparaît comme le témoignage d'un monde en perdition peut inspirer le spectateur comme le laisser perplexe. La critique de l'artiste n'est pas toujours évidente à comprendre et l'absence de traductions de certains textes empêche parfois de saisir l'essence de l'œuvre. Il est donc important de se renseigner sur la singularité des travaux de Jimmie Durham pour adhérer à son style.

lundi 20 avril 2009

Beirut - The Flying Club Cup


L'ouverture de The Flying Club Cup se fait sur le son lointain et mystérieux d'une conque qui nous invite à grimper à bord d'un navire enchanté. L'équipage qui mène à bien cette drôle d'embarcation se compose de cuivres, de cordes, de percussions, de vents et de la voix envoutante du capitaine Zach Condon. Le passager, se délectant de cette poésie onirique, se retrouve alors tout étourdi par les milliers d'images qui lui traverse l'esprit.
Il accoste tout d'abord à Nantes, ville festive et inquiétante, hantée par le chant solitaire des trompettes et les bris de verre. Dès cet instant, une douce mélancolie l'envahit et l'accompagne tout au long de son voyage. Il s'abandonne ainsi et chante en cœur avec l'équipage de A Sunday Smile, déambule imbiber de rhum dans les rues de La Banlieue, se laisse bercer par la ballade au ukulélé de The Penalty, déballe ce qu'il a sur le cœur en buvant Un Dernier Verre (Pour La Route) et termine son périple tel un conquérant dans The Flying Club Cup.
Le style unique de Beirut se retrouve dans cet album où le mélange savoureux de folk et de fanfares balkaniques nous invite à faire le tour du monde. Dans la lignée de leur deux premiers albums, Lon Gisland et Gulag Orkestar , la troupe esquisse un univers intemporel dans lequel le visiteur passe de la méditation à la gueule de bois. Zach Condon confirme son incroyable virtuosité en orchestrant avec fougue et grâce les souvenirs de ses voyages européens.

dimanche 12 avril 2009

Close to Paradise de Patrick Watson, l'album qui me suis depuis bientôt deux ans


La plupart du temps, on sait à la première écoute d'un album si celui-ci aura une place importante dans notre discothèque. Puis arrive le moment où il devient indispensable à notre journée et bien souvent, quelques mois plus tard une pause s'impose car overdose... Plus rarement, la découverte d'un disque peut être infinie et vous procurer un plaisir croissant à chaque écoute. Ce rare état d'amour absolu est enfin possible depuis la sortie de Close to Paradise du groupe montréalais Patrick Watson en septembre 2006.

Cet album est le résultat d'une symbiose entre art et musique qui vous plonge dans un voyage enchanteresque, dont les premières notes tissent les bases d'un cocon de douceur qui vous accompagne et s'intensifie à chaque morceau. Les sonorités électroacoustiques du groupe, possèdent un côté artisanal qui fait naître une atmosphère onirique où se côtoient la frénésie de Luscious Life et la volupté de Slip Into Your Skin. Ces quatre musiciens réinventent à travers treize morceaux le concept du road trip musical. La plume légère de Patrick Watson laisse au voyageur la liberté d'interpréter ses paroles et de construire son propre décor. Ici la traditionnelle ligne droite des road movies laisse place à la route pavée de briques jaunes où toutes les fantaisies sont admises et où les rêves se réalisent. Les mélodies que composent Watson sur son piano possèdent la fluidité de contemporains qu'il admire, tels que Debussy ou Satie, à qui il rend hommage avec Mr Tom.

Son chant aérien ajoute une aura mystérieuse à un univers peuplé de bruitages, de samples et de notes planantes qui prend toute son ampleur sur scène, notamment avec la version a cappella de Man Under The Sea.

Le songwriter et sa bande nous concoctent un album très imagé, dont les multiples influences, cinématographiques et musicales, sont absorbées, remodelées afin d'élaborer une oeuvre unique. Close to Paradise s'inspire sans copier de la douce folie burtonienne ainsi que de l'anarchie lynchienne et évoque tour à tour des artistes tels que les Pink Floyd, Nick Drake, Bjork, Philip Glass ou encore Jeff Bucley.

A la fois folk, pop, alternatif, rock et bien d'autres styles, Close to Paradise nous emmène dans une contrée lointaine que certains appellent même...le Paradis.